lundi 26 janvier 2009

Pour faire le portrait d'un oiseau

Peindre d'abord une cage
avec une porte ouverte
peindre ensuite
quelque chose de joli
quelque chose de simple
quelque chose de beau
quelque chose d'utile
pour l'oiseau
placer ensuite la toile contre un arbre
dans un jardin
dans un bois
ou dans une forêt
se cacher derrière l'arbre
sans rien dire
sans bouger ...
Parfois l'oiseau arrive vite
mais il peut aussi bien mettre de longues années
avant de se décider
Ne pas se décourager
attendre
attendre s'il le faut pendant des années
la vitesse ou la lenteur de l'arrivée de l'oiseau
n'ayant aucun rapport
avec la réussite du tableau
Quand l'oiseau arrive
s'il arrive
observer le plus profond silence
attendre que l'oiseau entre dans la cage
et quand il est entré
fermer doucement la porte avec le pinceau
puis
effacer un à un tous les barreaux
en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau
Faire ensuite le portrait de l'arbre
en choisissant la plus belle de ses branches
pour l'oiseau
peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
la poussière du soleil
et le bruit des bêtes de l'herbe dans la chaleur de l'été
et puis attendre que l'oiseau se décide à chanter
Si l'oiseau ne chante pas
c'est mauvais signe
signe que le tableau est mauvais
mais s'il chante c'est bon signe
signe que vous pouvez signer
Alors vous arrachez tout doucement
une des plumes de l'oiseau
et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.
Jacques Prévert

12 commentaires:

  1. J'adore ce petit poème !!!

    L'illustration en est magnifique, c'est chez toi ??

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  2. Oui, c'est chez moi! C'est un cadeau de j'ai reçu récemment...
    Grosses bises Kahlan

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  3. Aaaah, Prévert!L'adolescence, premiers émois poétiques, premiers plaisirs des mots, illusion que la poésie est une chose facile, découverte qu'elle ouvre les portes d'un monde merveilleux...
    Prévert, ou les premiers pas sur un chemin qu'on ne se lasse pas d'explorer..

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  4. Superbe poème !
    J'aime beaucoup l'image c'est superbe!
    Bonne journée Kenza
    amitié
    corinne

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  5. Un poème tout simple et pourtant si délicat... Merci de faire remonter tous ces jolis souvenirs!!!
    Bisous

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  6. Je ne pensais pas remuer tant de souvenirs d'enfances avec un seul poème!!!
    Je suis toujours très contente de savoir que tu es passée par ici!
    Bises

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  7. Peut-être as-tu grandi ailleurs, ou peut-être es-tu trop jeune pour avoir connu ça.Mais pour ma génération, il y avait quelques incontournables: quand on sortait de l'école primaire(filles et garçons séparés..) , on avait tous lu la comtesse de Segur et "Sans famille " d'Hector Malot. Au collège, c'était "le lion" de Joseph Kessel, et la trilogie de Pagnol. Et au lycée, on lisait Boris Vian, Albert Camus et bien sûr, Prévert. C'était obligatoire, inévitable et partout pareil. C'est pour ça ,je pense, que le fait que tu mettes ce poème soulève autant de nostalgie...

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  8. J'ai effectivement grandi ailleurs, et comme toi petite j'ai lu La Comtesse de Ségur, Victor Hugo... puis plus tard Kafka, Malraux, Camus,Sartre et les autres, mais pour ce qui me concerne, ces lectures m'évoquent des souvenirs et des moments heureux...
    Bonne journée Malyss

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  9. Belle illustration pour un poème que j'adorais enfant et que j'ai aimé apprendre plus tard à mes petits élèves..! Je viens d'aller vopir l'expo, elle mérite le déplacement.Un aperçu ici...;-)
    Bises

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  10. Je n'ai malheureusement pas eu le temps de voir l'expo lors de mon dernier séjour à Paris!
    J'avais trouvé l'affiche très belle, alors si je retourne à Paris avant le 28 février, j'irai certainement la visiter...
    Merci Monik

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  11. j'ai toujours adoré ce poème de Prévert, merci Kenza de me le remettre en mémoire. Bises

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  12. Mais c'est vraiment un plaisir! Je suis ravie de constater que ce petit poème provoque tant d'émotion!!!
    Bises

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«Trois opérations : Voir, opération de l’œil. Observer, opération de l’esprit. Contempler, opération de l’âme. Quiconque arrive à cette troisième opération entre dans le domaine de l’art.» Emile Bernard