mercredi 16 décembre 2009

Ecrire la peinture de Diderot à Sollers, Pascal Dethurens

La peinture est une poésie muette et la poésie une peinture aveugle.
Léonard de Vinci

Les premières descriptions d’œuvres d’art en littérature remontent à l’Antiquité avec L’Iliade et L’Énéide– d’où le terme d’ekphrasis utilisé pour qualifier cet exercice de style, ce défi rhétorique qui consiste à donner à voir ce qui n’est pas sous les yeux, à restituer l’indicible beauté plastique par la magie des mots.
À la Renaissance, les deux Muses, l’Art et la Poésie se trouvent des affinités électives. Poètes et écrivains dès lors rivalisent d’audace et d’inventivité pour rendre compte de tableaux dans leurs œuvres.
Avec Diderot, le genre acquiert ses lettres de noblesse et entre dans l’histoire littéraire. Pendant plus de vingt ans, de 1759 à 1781, il excelle à rendre compte des Salons de peinture du Louvre où exposent les Chardin, Greuze, Vernet et autre Fragonard. Le ton est donné, libre et vif, sans demi-teinte dans les jugements de valeur, qu’ils écorchent ou qu’ils portent au pinacle. C’est cette liberté qui fera les grandes heures de la critique d’art au XIXe siècle avec Stendhal, Gautier, Baudelaire, Zola, Mirbeau… Leur prose vibrante et enlevée jouera un rôle important dans la reconnaissance des peintres de la modernité tels les impressionnistes (Manet, Monet notamment).
Au XXe siècle, les sphères de la peinture et de la littérature s’entrecroisent, voire se confondent ; peintres et écrivains partagent les mêmes sources d’inspiration, défendent les mêmes aspirations au renouveau esthétique. Ainsi naissent les grands duos « écrivain-artiste » : Proust-Monet, Apollinaire-Picasso, Breton-Ernst, Genet-Giacometti, Beckett-Van Velde, Leiris-Bacon… Plus que jamais, dans une émulation créatrice très féconde, la plume des uns devient le prolongement désigné du pinceau des autres.
En confrontant directement les œuvres picturales avec leurs commentaires littéraires, cette anthologie illustrée se propose d’explorer ce dialogue éternel entre les arts, cette fascination réciproque qui a donné naissance à quelques-unes des grandes pages de la littérature française. De Pompéi à Francis Bacon, en passant par Raphaël, Rubens et Delacroix, ce livre somptueux nous invite à une promenade parmi les chefs-d’œuvre de la peinture occidentale, sous le regard complice et éclairé de nos grands.

Coup de coeur

1 commentaire:

  1. j'aime cette formule: les plumes des uns prolongent les pinceaux des autres...
    Magie des mots et des images, tu nous donnes à admirer l'art avec un grand A
    merci, ma chère kenza!

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«Trois opérations : Voir, opération de l’œil. Observer, opération de l’esprit. Contempler, opération de l’âme. Quiconque arrive à cette troisième opération entre dans le domaine de l’art.» Emile Bernard