« … il faudrait parvenir au bout de la vie avec le sentiment d’une conclusion atteinte et non d’une interruption,
achever son existence dans l’exténuation des désirs
et ainsi mourir dans la sagesse et non dans l’effroi,
paisiblement. »
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Jodel possède une acuité auditive hors du commun, il entend absolument tout. Cette hypersensibilité aux
bruits dont il subit les agressions jour et nuit et qui l’oblige à vivre en retrait, est en même temps son outil de travail. En effet, son métier consiste à décrypter des enregistrements sur bandes magnétiques pour le compte d’un laboratoire qui travaille en étroite collaboration avec les services de police.
Sa vie est chamboulée le jour où il rencontre Jeanne, une fillette de 11 ans atteinte d’hyperacousie comme lui. Cette ressemblance qui les rapproche, fait naître une grande complicité entre eux. Jodel se prend immédiatement d’affection pour cette petite fille et se charge de lui apprendre à gérer, à reconnaître, à trier et à ordonner dans l’espace ces informations sonores qu’ils sont bien conscients d’être seuls à entendre.
Un roman admirablement écrit et très agréable à lire. J’ai aimé me perdre dans cette extravagante intrigue policière. J’ai savouré la poésie, la musique et la sensualité des personnages atypiques et peu ordinaires de ce dernier roman de Belinda Cannone.
Je ne peux pas parler de ce livre sans évoquer la charmante personne qui me l’a offert. Merci ma chère Karine pour ce roman que tu m’as offert un beau dimanche ensoleillé, et que j’ai eu grand plaisir à lire. Merci pour ces moments d’émotions partagées, ce même dimanche, pendant la visite de cette fabuleuse et inoubliable exposition Lippi au Musée du Luxembourg ! Merci pour ces délicieuses et inespérées rencontres avec Delacroix, Ingres, Zweig au Jardin du Luxembourg! Merci surtout pour ces fabuleux voyages empreints de poésie que je découvre tous les vendredis sur ton blog ainsi que pour les surprises que tu me fais sur ta si jolie Toile de Candide ! ~~~~
Extrait
« Au début, elle ne se servait de cette langue que lorsqu’elle était couchée, au réveil et le soir avant de s’endormir. Elle identifiait dans la maison la voix de sa mère, la radio, les insectes et les petits animaux, mais elle était fâchée de ne pas savoir nommer d’autres bruits qu’elle reconnaissait, le long des tuyaux et sur le toit, derrière les vitres, dans l’air du soir ou du petit matin, mille sonorités qui lui étaient devenues familières bien qu’elle ne sût leur attribuer ni origine ni nom. A quoi servait d’entendre autant si elle n’avait pas de mots pour le dire- se le dire ? Elle avait donc inventé cette langue enrichie, au fil du temps, de bruits du plein jour. Il arrivait souvent qu’elle oublie le nom d’un bruit éphémère qui ne s’était jamais reproduit, ou au contraire qu’il lui reste le nom mais plus la mémoire du son. Le grouitche, le zblune, la zzzirète, le traillement comptaient parmi les plus classiques : grande fréquence. Mais elle n’avait entendu qu’une fois le rouize et ne se rappelait même plus à quoi il ressemblait. C’est pourquoi tout à l’heure, alors qu’elle travaillait avec beaucoup d’application pour qu’il ne se décourage pas, dès que lui est revenu ce souvenir de langue inventée, elle s’est amusée, yeux grand fermés, à créer des noms pour les bruits de la forêt qu’elle distinguait. »
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