Quatrième de couverture
Françoise Sagan est morte le 24 septembre 2004, laissant une dette fiscale de plus d’un million d’euros et une œuvre, composée
d’une trentaine de romans et d’une dizaine de pièces de théâtre, sur le point
d’être purement et simplement liquidée. Denis Westhoff, son fils unique,
décide, en 2006, d’accepter cette succession empoisonnée, hors norme.
Il réalise alors
que la femme publique, celle que tout le monde croit connaître, prodigue avec
son argent, aimant vivre dangereusement et de préférence à cent à l’heure, lui
est longtemps restée inconnue. Lui a été aimé et élevé par une mère qui a pris
soin de le protéger des éclats de sa légende.
L’envie de
remettre les points sur certains i, de dire les choses telles qu’il les a vues,
entendues, et non pas telles qu’on a bien voulu les interpréter, grandit peu à
peu en lui. En repassant par certains lieux, en se remémorant des anecdotes,
des moments forts, gais ou douloureux, des conversations intimes, en dessinant
les portraits de ceux qui ont vraiment fait partie du cercle Sagan, il éclaire
d’une lumière totalement inédite l’une des figures majeures de la littérature
française.
Ce livre n’a pas pour ambition de dire la
vérité sur Sagan, mais une vérité. Celle d’un fils qui ose dire enfin, avec
bonheur et liberté, ce qu’il a vécu auprès d’une mère pas tout à fait comme les
autres.
Denis Westhoff est photographe. Il signe chez Stock son
premier livre.
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Françoise Sagan, (c) Jacques Rouchon 1954 |
Extrait
Après un été parisien passé à lire Sartre, Camus, Cocteau, elle sera admise au couvent des Oiseaux, puis renvoyée pour
« manque de spiritualité
». Il faut dire qu'elle y récitait Prévert:
« Notre Père qui êtes aux cieux, restez-y. Et nous resterons sur la terre qui est si jolie.
» Ce qui, dans un couvent, était très mal vu. Ma mère passe finalement ses deux bachots dont un à la session de rattrapage d'octobre, et s'inscrit à la Sorbonne en propédeutique. Mais les amphi-théâtres sont le plus souvent bondés et l'essentiel des cours se transforme bien vite en virées avec des amis dans le quartier Saint-Michel. Dans les conversations, il est beaucoup question de Dieu, de métaphysique et de politique. Et lorsqu'on a dix-sept ans en 1953 et que l'on s'intéresse à la littérature, les références sont Sartre et Camus, les deux écrivains qui occupent presque tout l'espace littéraire de l'époque.
Qu'elle ait dix-sept ans, se sente sûrement plus proche de Sartre que de Camus et soit un peu mythomane ne suffit cependant pas à expliquer qu'elle se mette en tête d'écrire un roman. L'écriture est une envie dont elle est saisie, une vocation, et elle sait déjà qu'elle veut en faire son métier, je dirais même sa vie.
«J'avais toujours pensé devenir écrivain.
» Bonjour tristesse n'est pas le fruit d'un hasard, ni d'une lubie.
Bonjour tristesse est la réalisation de cet amour vrai pour l'écriture, pour les mots et pour la littérature. Ma mère fait partie de ces écrivains qui ont beaucoup lu, des écrivains
cultivés. Elle, qui justifie sa mythomanie comme naturelle à son âge, va prétendre auprès de ses amis et de ses proches qu'elle écrit un roman. Et à force de le dire - et parce que je suppose que l'on devait lui demander régulièrement des nouvelles de son texte -, elle finit par le faire.
Bonjour tristesse naquit ainsi de sa passion pour la littérature et de cette
« obligation
» de devenir écrivain. La parution du roman fut une surprise qui éblouit tout le monde, elle la première.
STOCK