« Quand
ton fils a grandi, fais-en ton frère. »
Quatrième de couverture
« Nous aurions filé vers les Pyrénées. On aurait coupé
l’Espagne de haut en bas. Une manière de césarienne pour exhumer ton histoire.
Nous serions remontés au début, jusqu'à Fès, ta ville natale. Serions-nous
jamais arrivés ? »
À l’automne 2012, j’ai voulu emmener mon
père marocain dans les rues de sa jeunesse, le quartier juif de Fès, la médina,
l’entrelacs de ses souvenirs campés entre l’université de la Karaouine et la
façade de l’Empire qui fut jadis le plus grand cinéma d’Afrique du Nord.
J’ai fait le voyage sans lui. La maladie
en a décidé ainsi, je suis devenu à sa place le marcheur de Fès. J’ai compris à
quoi tient une existence. Un kilomètre à peine sépare le mellah de la ville
moderne, le monde juif de l’ancien secteur européen. Dans ce mouchoir de poche,
Moshé Maman est devenu Maurice Maman. Comme tous les siens, le Juif marocain a
rêvé de s’intégrer à la France, de parler sa langue, d’y construire sa maison,
sa famille, son avenir.
J’ai traversé les ruelles et les
cimetières, poussé la porte des rares synagogues, parlé aux derniers Juifs
fassis dont la flamme s’éteindra bientôt. À chaque pas, je suis tombé sur ce
père longtemps inconnu. Jusqu’à tomber sur moi, à l’improviste.
Eric
Fottorino est l’auteur de nombreux romans et récits qui traduisent sa quête des
origines, comme Korsakov, L’homme qui aimait tout bas et Questions à mon père, parus chez
Gallimard. Avec Le marcheur de Fès,
il continue d’interroger le thème de la filiation à travers les racines
marocaines de son père naturel.
Jacques Moreau (1903-1994), Fez, Bab el Mellah |
Extrait
Je
sais que là, quelque part, dorment Yahia, ton grand-père le Berbère, et son
épouse Zohra. Eux aussi je les chercherai. Pour l’instant Albert-Abraham tente
de m’instruire sur votre communauté en voie de disparition. Moins de cinquante
personnes à présent. Rien que des vieux. « Nous n’avons plus d’enfants »,
dit-il sans insister. Il sort des feuilles dactylographiées qui tremblent dans
le vent. Devant nous l’horizon à perte de vue, les mamelons du Moyens Atlas. La
nécropole est le seul lieu du mellah où le jour entre à pleine lumière, ou rien
n’entrave la perspective. D'une voix un peu scolaire, le rabbin à barbe blanche
laisse tomber des chiffres d’autrefois, quand les Juifs vivants se comptaient
plus de vingt mille à Fès. C’était au début du protectorat. Depuis le XVe siècle,
le sultan avait voulu le mellah collé à l’enceinte de son palais afin d’assurer
la protection des Juifs. S’il tenait à leur proximité, c’était aussi pour
solliciter à tout moment leurs médecins réputés infaillibles. Et pour s’assurer
la fidélité des artisans de Sion, si habiles pour ciseler l’or, l’argent, le
diamant. En transformant les métaux précieux en bijoux rares, ils
accomplissaient des prodiges interdits aux Musulmans par le Coran.
En
ce temps là, les Juifs étaient des dhimmi,
des protégés, libres de leur culte, placés sous le regard bienveillant du
palais, à condition qu’ils acceptent de porter la calotte noire, d’être
assujettis à l’Islam et à l’impôt. Calmann-Lévy
À lire! Merci!
RépondreSupprimerLa couverture illustre parfaitement la poésie du texte.
RépondreSupprimerBonne journée Kenza.
Envie de le lire. Merci pour la découverte !
RépondreSupprimerJ'avais beaucoup aimé "l'homme qui aimait tout bas" je note ses deux derniers !
RépondreSupprimerBonne soirée !
c'est là où j'avais buzzer
RépondreSupprimeret bien je trouve que commencer un roman sous cette forme est intéressante , j'avais commencé une parole à mon père quelques cjour plus t^to sous cette forme et quand j'ai lu ce 4eme de couverture ca m'a fait chaud le cœur comme quoi sans le savoir certaines formes se formes dans nos premiers jets je t’embrasse