William Merritt Chase (1849-1916), Arab encampement
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Quatrième de couverture
Et après tous ces assassins illustres ou obscurs, mon couteau sanglant au poing et devant ce ventre ouvert, je me sentais humilié.
Hector France n'est pas un écrivain pour lecteurs délicats. Officier en Algérie durant les années 1860, il compose ici à partir de ses souvenirs de jeunesse seize fictions qui forment les mille et un jours du cauchemar colonial.
Et après tous ces assassins illustres ou obscurs, mon couteau sanglant au poing et devant ce ventre ouvert, je me sentais humilié.
Hector France n'est pas un écrivain pour lecteurs délicats. Officier en Algérie durant les années 1860, il compose ici à partir de ses souvenirs de jeunesse seize fictions qui forment les mille et un jours du cauchemar colonial.
Armé d'un style affûté et d'un humour grinçant, loin de se complaire dans des bizarreries exotiques nimbées des vapeurs du kif, il écorche vif l'orientalisme flamboyant : délires de soldats traumatisés, bassesses révulsantes de misérables poussés à la dernière extrémité, ignominies des puissants - le cynisme et l'oppression envahissent la scène jusqu'à basculer parfois dans l'horreur pure.
La gifle remue aujourd'hui avec d'autant plus d'efficacité que Sous le burnous, paru en 1886, constitue comme une épouvantable préface à l'autre guerre d'Algérie - en réalité la même, sans doute - dont les plaies profondes n'ont pas fini de suppurer.
Biographie
Hector France (1854-1908) eut une vie mouvementée de soldat, de communard, d'exilé et d'écrivain. Aucun de ses nombreux ouvrages n'avaient été réédité jusqu'à ce jour.
Eric Dussert est bibliomane, collaborateur au Matricule des Anges et directeur de la collection "L'Alambic" aux éditions L'Arbre vengeur.
Extraits
" Bref, absente, éloignée, perdue là-bas, là-bas, dans un coin de la frontière tunisienne, elle excitait les plaisanteries des chambrées, la gaieté des cantines, les lazzis des camps, la jalousie des Aglaés de corps de garde, l'indignation des femmes vertueuses, les convoitises de tous les spahis.
La fille du Biskri! Tous en parlaient et cependant combien peu pouvaient se vanter de la connaître! Elle était comme ces contrées lointaines et merveilleuses dont chacun discourt sans les avoir jamais vues. Une dizaine d'entre nous, au plus, nous en avions fait le calcul, avaient navigué sous ses chaudes latitudes, s'étaient bercés au souffle de son haleine parfumée de souak et consumés comme des morceaux d'étoupe aux ardents rayons de ses grands yeux noirs.
Aussi abondaient sur sa personne les détails le plus contradictoires.
Les uns la prétendaient aussi osseuse et décharnée que les pitoyables bourriques qui charrient sur leur dos saignants les détritus de Constantine dans les ravins de Koudiat-Aty, les autres, énorme et grasse comme une truie de Lorraine; ceux-ci affirmaient qu'elle exhalait les odeurs d'une négresse qui aurait poursuivi un lièvre à la course; ceux-là qu'elle infectait le musc.
Elle était, suivant les premiers, vivante, rétive, brutale comme une chèvre amoureuse; selon les seconds, facile, passive et lâche comme une chamelle fourbue.
Que croire? Si ce n'est que ces malveillants lovelaces ne l'avaient jamais approchée; renards piteusement éconduits, ils dépréciaient le raisin trop vert, mais les heureux qui avaient pu mordre à la grappe parlaient, les yeux noyés et la salive aux lèvres, de la saveur du fruit.
Cependant tous s'accordaient sur un point: la beauté sans pareil de son visage; et pour la description de cette beauté, les enthousiasmes ne variaient pas. Et c'était là le plus extraordinaire, ces contradictions d'une part et cette unanimité de l'autre, car depuis quatre ou cinq années, les maréchaux des logis français désignés à tour de rôle pour commander la petite smala d'El Tarf, sous les ordres de l'inamovible capitaine Ardaillon, les seuls du régiment qui eussent occasion de la connaître, se passaient cette merveille en consigne avec les effets de casernement du bordj...."
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Valerii Ivanovich Yakobi (1836-1902) An Oriental beauty |
Ses cheveux caressent ses épaules
Comme deux lourdes tresses de soie;
Ses sourcils sont deux arcs d'ébène;
Sa prunelle un coin de nuit
Où scintille une étoile;
Sa lèvre, une grenade ouverte,
Où l'on mord quand on a soif.
Ses seins sont blancs comme la neige
Qui tombe dans le Djebel-Amour:
Ils ont la dureté du marbre,
L'élasticité de la metara pleine
Et sont plus doux que le miel...
l'ambiance orientale de retour..
RépondreSupprimerl'en tête..les oiseaux sont de Monnoyer? bisou elfi
Merci pour ce délicieux moment de culture et de beauté !
RépondreSupprimerMerci. Tes billets sont si interessants et ouvrent l'esprit et le coeur. Merci hayati.
RépondreSupprimerMerci pour ce moment de lecture. Un écrivain que tu me fais découvrir.
RépondreSupprimerSplendide billet ... d'une force émotionnelle intense que l'on perçoit à travers tes mots.
RépondreSupprimerKenza, ton blog est magnifique ! C'est un cri du cœur !
Bisous
Je suis d'accord avec Pétales, ton blog est magnifique ainsi que la découverte de ce texte d'Hector France.
RépondreSupprimerUn témoignage intéressant et cynique, pris sur le vif qui raconte simplement la vie.